la stratigraphie des images

documentation céline duval

 

September 20 — November 15, 2014

Espace arts plastiques Madeleine-Lambert, Vénissieux (Fr)

 

Photos: documentation céline duval
La fable engagée d’Actéon, par Jean-Emmanuel Denave

 

A l’Espace d’arts plastiques de Vénissieux, avec un peu de malice peut-être, l’artiste Céline Duval (née en 1974, elle se présente sous le nom d’artiste “documentation céline duval”) nous propose pourtant bel et bien un “bain d’images”. Il s’étend devant nous comme une déferlante que l’on “domine” du regard et qui, pour une fois, ne nous domine pas. Des lignes de fuite se dessinent, des thématiques se font écho (la mer et l’eau justement, la grotte et le minéral, etc.). Cette surface ondulée invite le corps du visiteur à s’engager physiquement, à naviguer entre les lutrins supportant les images. Le bain proposé n’est pas celui, habituel et contemporain, d’une projection et d’une prolifération noyantes de “visibilités” sur l’oeil-écran immobile du spectateur. Il est davantage une invitation à la déambulation, à la curiosité, à la perception attentive : l’image rappelle ici ses liens essentiels au corps et au mouvement. Ce bain n’est peut-être pas non plus sans danger, quelques images exposées rappelant le mythe de Diane au bain, où Actéon (ce chasseur d’images au fond) est transformé en cerf pour avoir vu la déesse nue, puis dévoré par sa propre meute de chiens de chasse. Il y a aussi de la pulsion et du désir dans l’acte de regarder…

 

L’ensemble des images que l’on découvre à Vénissieux est tiré du colossal fonds d’images de Jules Maciet qui en rassembla plus d’un million (gravures, photographies, illustrations de journaux…) entre 1885 et 1911. Céline Duval en a sélectionné plusieurs dizaines qu’elle a elle-même re-photographiées, recadrées, créant des effets de flou et de profondeur de champs au sein même des travaux d’origines. L’agrandissement montre aussi les trames des journaux ou les détails du burin des estampes. Céline Duval tient ainsi les deux fils essentiels de l’image : sa matérialité sensitive et ses effets de sens (sa part symbolique et/ou imaginaire). Nous percevons ici autant la trame concrète des images que la trame imaginaire les composant ou les reliant entre elles.

 

Extrait de l’article Céline au bain, publié dans Le Petit Bulletin n°771, le 14 octobre 2014